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Techniques d’exploration : passez des mois entiers à loucher sur les murs de la prison, à tester toutes les serrures, à pousser toutes les ouvertures possibles…et à pester sur l’absence de la moindre faille dans le réseau de sécurité de la prison. Regardez les ouvriers chargés de la démolition abattre un pan de mur pour le passage des engins de chantier. Revenez le dimanche suivant. Escaladez la nouvelle barrière. Rentrez dans le bâtiment abandonné le plus près de chez vous que vous n’ayez jamais fait : trois minutes à pied ! Merci Dédé !

Construits en 1716, les bâtiments de la prison sont, à l’origine, ceux de la manufacture de tabac Léopold, devenue manufacture d’Etat sur décision de Napoléon. Les lieux ont été transformés en maison de correction en 1824 puis en maison d’arrêt en 1857. Ils ont également été le témoin des heures sombres de la seconde guerre mondiale quand des prisonniers politiques, des résistants et des juifs y furent enfermés avant d’être envoyés dans les camps d’extermination nazis.

Un taux d’occupation de plus de 150%. Deux à six prisonniers dans des cellules de 9 à 15 mètres carrés. Des suicides à répétition. Des meurtres barbares entre co-détenus commis dans l’indifférence de l’administration pénitentiaire. Bienvenue dans le monde merveilleux des prisons françaises. Un système digne des geôles les plus sombres de la république de Moldavie selon l’observatoire international des prisons. Le tout –n’en déplaise à Michel Foucault– en plein coeur de la ville de Nancy.

Or, il se trouve que l’état français a dû lui aussi relire dernièrement "Surveiller et punir" et, en accord avec le maire plénipotentiaire de Nancy, décida de la construction d’une nouvelle prison. Une prison ultra-moderne, propre et surtout….100% privée ! Pour couronner cette belle idée de la privatisation de l’emprisonnement, le nouveau centre pénitentiaire est situé -loin des yeux, loin du centre- à l’ombre des hérésies architecturales du quartier périphérique du Haut du Lièvre. Michel Foucault peut reposer en paix.

Aujourd’hui, la prison Charles III n’est plus qu’un tas de ruines, rejoignant dans l’oubli le formidable patrimoine architectural nancéien sacrifié sur l’autel des grands ensembles et des idées médiocres. Elle laisserait bientôt la place à un pseudo éco-quartier-bobo avec des vrais arbres en bois….

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